Que diriez-vous d’un petit rendez-vous hebdomadaire autour de l’art et de la maternité? Chaque samedi je vous proposerais une œuvre (un tableau, une photo, une sculpture) qui traite de ce sujet. Pour ce premier rendez-vous, j’ai choisi un tableau de Chagall, Maternité, et un extrait du livre Secrets de mères dans lequel le médecin René Frydman évoque cette œuvre.
– 1913, Stedelijk Museum, Amsterdam –
“Je me rappelle ce garage où se confectionnaient les images de synthèse du film de Nils Tavernier, L’Odyssée de la vie. J’avais le statut de conseiller scientifique, je suggérais là de rosir la peau, là d’accentuer les plis, je prenais la pose de l’enfant, je me recroquevillais, mes bras ébauchaient les siens… J’ai fini par le deviner, moi aussi à l’attendre.
Mais à bannir l’invisible, on efface le rêve. Il y avait quatre grandes photos comme celles-là dans les couloirs de la maternité. Nous les avons retirées: trop crues, trop précises, trop anatomiques. Les sages-femmes ne les aimaient pas, les parents non plus, eux qui gardent chaque fois religieusement la première échographie, ombre pourtant difficilement lisible, striée de noir et de blanc. Ce blanc où ils nichent leurs désirs (…). Il n’est pas d’attente heureuse sans imagination.
L’enfant est depuis toujours dans nos rêves comme sur la toile de Chagall Maternité: Petit homme debout, déjà musclé. Il rayonne derrière la jupe jaune et fleurie de sa mère qui le montre fièrement du doigt; tous deux appartiennent encore à un monde cosmique, mais de lui on sait déjà qu’il est fort et prêt à marcher dans la vie.”
(Extrait de Les secrets des mères de René Frydman, éditions l’Iconoclaste)
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